- Considération préliminaire, et sans aucun doute la plus importante de ce billet : A Noisy-le-Grand, la responsabilité et la détermination des citoyens les conduit demain matin à accompagner jusqu'à l'école les enfants qui, malgré toutes les démarches entreprises auprès de la Mairie, sont encore privés de scolarisation. Le rendez-vous est fixé à 8h15 devant l'école "du clos de l'arche", au 10 route de Villiers à Noisy-le-Grand. Didier Cusserne, représentant du "Collectif de soutien aux familles Rroms de Noisy le Grand", est joignable au 06 08 88 58 16. Dans un monde fonctionnant à l'endroit, nous devrions être au moins aussi nombreux demain matin devant l'école pour tous, qu'ils le furent aujourd'hui contre le mariage pour tous... -
Envoyé à la presse mercredi dernier alors que les enfants du bidonville passaient une journée en Mairie pour obtenir reconnaissance de leurs droits, voici ci-dessous le communiqué du député de l'Essonne Thierry Mandon, porte-parole du groupe PS à l'Assemblée Nationale, Président de l'Ecole de la deuxième chance en Essonne, Maire de Ris-Orangis du 18 juin 1995 au 25 octobre 2012 date à laquelle, pour cause de cumul des mandats, il céda son poste à Stéphane Raffali alors élu à l'urbanisme, aujourd'hui toujours conseiller municipal et, si tant est que cela permette de situer un peu davantage, membre de l'équipe de campagne d'Arnaud Montebourg lors des primaires socialistes.
Un premier commentaire, dont on aurait aimé se passer à cette date avancée de la controverse, doit consister à rappeler une énième fois les faits et les droits, et ainsi défaire la démonstration, sans doute voulue de force, du député. D'une part, il le sait, le Maire également, et chacun d'entre nous évidemment : à trois reprises depuis le début de l'année, les demandes de scolarisation de ces enfants ont été formulées et déposées en Mairie, d'abord en septembre pour 3 d'entre eux, puis pour 6, puis enfin, il y a de cela un peu plus d'un mois, pour 12. Aussi, lire sous la plume du député que le Maire a mercredi "fait face à une demande massive et précipitée d'inscriptions" est extrêmement fatiguant. D'autre part, la fatigue accable presque lorsqu'on découvre que le député, s'autorisant qui plus est de s'en référer au "droit existant", reprend cet argumentaire balayé mille fois ces derniers jours du fameux dossier incomplet : il manquait, nous dit-on, "un minimum de papiers conformes aux textes". Les textes de lois, la circulaire de la Ministre déléguée Pau-Langevin et les rappels de l'Inspection d'Académie au Maire ne sont manifestement pas assez clairs pour que ces élus de la République entendent enfin que le droit à la scolarisation est inconditionnel, que l'état civil des enfants suffit et que, quand bien même manquerait-il un obscur formulaire x ou y qu'il sera toujours temps de remplir, l'enfant doit être scolarisé immédiatement. Alors, le Ministre de l'Education, la Ministre déléguée à la Réussite Scolaire, la chargée de mission "éducation / culture" de la Délégation Interministérielle à l'Hébergement et à l'Accès au Logement, le Directeur académique des services de l'Education nationale, le Préfet du département, le Préfet chargé de l'égalité des chances, et le Défenseur des droits, qui tous ont été saisis depuis mercredi vont, dans les jours prochains, rappeler à l'ordre le Maire, agent de l'Etat dans ce contexte précis, de telle sorte à ce qu'il réponde favorablement aux demandes qui depuis des mois lui ont été adressées.
Un deuxième commentaire, bien plus stimulant, permet de souligner combien nous sommes d'accord avec le député sur un point précis, et crucial : que la question posée, non pas celle des Roms comme il l'est malencontreusement indiqué dans le titre de ce communiqué, mais celle de la multiplication de bidonvilles sur notre territoire européen, est d'une ampleur telle que la Ville de Ris-Orangis ne peut y faire face seule. Une erreur s'est glissée dans le texte du député : personne n'a demandé au Maire de régler ce "problème" (ce fut d'abord "la question Rom", serait-ce devenu "le problème Rom" ?). L'action du PEROU vise bien au contraire à faire se reformuler la question de telle sorte à ce que se recompose la chaîne des responsabilités et que, collectivement, nous puissions nous donner de nouveaux moyens d'y répondre. La Mairie a sa part de responsabilité, en l'occurrence en termes de scolarisation, mais sont tout autant concernés la Communauté de Communes, le Département, la Région, l'Etat et l'Union Européenne, sans oublier les Rissoises et Rissois qui, soulignons le, sont aujourd'hui les plus manifestement enclins à assumer leur part de "responsabilité et de détermination". Tout l'enjeu réside précisément là : dans l'art et la manière d'enrayer le déni de responsabilité de chacun des acteurs, qui a l'effet de réduire ces familles à la condition de patate chaude qu'on se refile à chaque nouvelle expulsion.
On se gardera de faire un long commentaire sur la fin de ce communiqué, qu'il eut fallu d'ailleurs éviter de lire tant elle nous renvoie à ce que l'art politique contemporain a peut-être de plus gangréné et accablant, singeant la posture responsable d'un revers de rhétorique, feignant de prendre soin du monde en en prenant effectivement congé.
Un dernier commentaire doit nous permettre de ne pas conclure hâtivement, et de bien considérer que la démonstration de force du député socialiste s'avère une démonstration de faiblesse qui est aussi la nôtre. Nombre d'entre les militants accablés que nous sommes souhaiterait que ces mots traduisent le délitement généralisé, le mépris "décomplexé" pour ce qui fait le sol de notre République, le dévoilement de l'identité cynique qui avançait jusque là masquée sous les atours de l'élu de gauche. Qu'un élu, peut-être sincèrement socialiste, tienne aujourd'hui un discours si insultant pour les familles est plus grave que cela. Qu'un élu, peut-être sincèrement républicain, verse si manifestement dans le mensonge et le mépris du droit est plus grave que cela. C'est que la question posée à travers la multiplication des bidonvilles en Europe, au delà de la "question des Roms", est un fait historique d'une violence sans doute extraordinaire. Nous voici rendus, en 2013, à devoir répondre à ce que nous pensions ne plus jamais avoir à considérer, nous autres qui, il y a de cela quelques générations à peine, avons tous vécu dans des baraquements flanqués au milieu des rats et chauffés au poêle à bois. Avec ces élus désarmés, au sein des institutions sous l'égide desquelles nous sommes placés, à la force des droits que nos prédécesseurs ont conquis de haute lutte, il nous faut enfin travailler autrement, et inventer collectivement des solutions que personne aujourd'hui ne peut revendiquer connaître. Mais, seule certitude, en partant de l'humanité que nous avons en partage, comme l'y invitent par exemple les images prises par Christian Ionascu lors de cette journée de mercredi passée à la Mairie de Ris-Orangis, à voir ici.
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